Rapport
“Le rôle des universités ne se limite pas à l’enseignement et à la recherche – il comprend également une troisième mission : s’engager pleinement dans la société.” Les premières lignes de l’allocution debienvenue du Président de l’Institut universitaire européen, Renaud Dehousse à la conférence de haut niveau sur l’état de l’Union (SOU) de 2019 ont synthétisé les objectifs de l’IUE depuis sa fondation en 1976, à savoir: l’excellence scientifique liée à l’engagement social.
Sous le titre “La démocratie en Europe au XXIe siècle”, le SOU s’est déroulé du 2 au 4 mai à Villa Salviati et Palazzo Vecchio, Florence, sur des thèmes tels que l’État de droit, les inégalités entre les générations, le marché unique et la désinformation lors des élections. Hans-Gert Pöttering, Président de l’AAD, Enrique Barón Crespo, ancien Président du Parlement européen et de l’AAD, et Monica Baldi, qui n’a cessé de resserrer les liens avec l’IUE, ont représenté l’Association des anciens députés à la SOU.
La table ronde “Avons-nous vraiment besoin de politiciens ? E-démocratie vs. démocratie représentative” s’appuyait sur l’expertise de David Farrell, professeur à l’University College de Dublin, Tommaso Nannicini, membre du Sénat italien et professeur à l’Université Bocconi et du Président Pöttering. Au vu de l’érosion des systèmes de partis et de la diminution du nombre de membres des partis politiques, d’une part, et de l’utilisation accrue des outils de participation directe et de la e-démocrati. Les premières remarques du professeur Nannicini sur les anciens systèmes de partis, où les personnes impliquées dans le processus démocratique étaient agrégées par des convictions beaucoup plus fortes, ont été soutenues par le président Pöttering, qui a cité En Marche, en France, comme contre-exemple.
Des mouvements ou des programmes comme celui qui a porté Emmanuel Macron au pouvoir posent de plus grandes difficultés à une participation effective au processus politique que les structures traditionnelles des partis, qui, malgré leur rigidité, récompensent la compétence des personnalités politiques. Le professeur Farrell a souligné comment nos systèmes politiques se sont constamment montrés très adaptatifs face à l’adversité. Le Président Pöttering a ajouté que chaque génération a ses propres défis. Néanmoins, il a rejeté l’argument selon lequel l’e-démocratie pourrait faciliter la “sélection des politiciens”. La notion technocratique suggérée dans cette perspective saperait effectivement l’aspect normatif de la politique, trait indispensable de nos démocraties. M. Farrell a ensuite présenté les résultats récents dans son pays d’origine, l’Irlande, où des “assemblées de citoyens” ont été lancées avant des votes importants, comme le référendum sur l’avortement de 2018. Le résultat a été très positif, car l’Assemblée a canalisé les demandes populaires et contribué à mieux informer le public le jour du scrutin. M. Nannicini s’est à son tour félicité des possibilités offertes par l’administration en ligne; à la lumière de la spécialisation et de la bureaucratie croissante, la numérisation de la démocratie serait une promesse d’une plus grande transparence.
“La démocratie n’est pas tout”, a averti le Président Pöttering dans sa déclaration finale. Le respect de la démocratie directe et, dans le contexte de l’Union européenne, la reconnaissance de procédures référendaires différentes selon les Etats membres, ne devraient jamais dégénérer en dictature de la majorité. L’histoire a montré, au fil du temps, comment l’abus des instruments de démocratie directe met en péril la protection des minorités. En résumé, la cyberdémocratie devrait être un complément et jamais un substitut de la démocratie représentative et de l’État libéral.
Secrétariat de l’ADD